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Mon expérience du terrain, en enrichissement permanent, me donne une connaissance pertinente et réaliste du milieu zambien, notamment de son territoire rural. J’ai assisté aux cérémonies traditionnelles, j’ai participé à des mariages, je me suis rendue dans une veillée. J’ai de très bonnes relations avec le chef suprême du royaume Puta, qui m’a accueillie avec désintéressement, et me suis entretenue avec plusieurs sous-chefs de sa hiérarchie. J’ai été présentée au peuple Bwile lors d’une cérémonie officielle. Je prouve mon honnêteté vis-à-vis du peuple qui me donne sa confiance jour après jour et mon respect des traditions. Je participe activement à l’économie du royaume. J’ai acheté des terres, j’ai acheté une voiture. Je mets en place le projet du complexe Sawalsi -centre socio-économique, éducation/formation & bien-être (achat/réception matériaux, recherche de matériel, logistique, coordination de chantier, suivi des délais, estimation financière) ainsi que le développement rural du village Kangalo en accord avec son responsable, le headman. J’ai rédigé des contrats d’attributions de biens fonciers traditionnels, des factures d’achats, des autorisations. Je construis un réseau de personnes de tout statut social et de tout âge. Je constate de près le fonctionnement du système éducatif. J’ai voyagé dans les transports en commun: à 10 dans un taxi ou entassés dans les cars les uns sur les autres mêlés aux poules et aux odeurs de poissons. J’ai embauché en contrat à durée indéterminée plusieurs personnes. J’ai vécu chez l’habitant. J’ai donné des cours de français. Je soutiens financièrement un jeune zambien dans ses études universitaires. J’installe un système autonome d’alimentation en eau. J’ai acquis l’espace et crée les installations pour l’espace du club d’investisseurs. J’ai fais fabriquer une presse à canne à sucre artisanale pour l’extraction du jus et un moulin électrique à cacahuètes pour le beurre. J’ai fais faire du mobilier pour l’aménagement de la maison. J’ai écris au Président de la République pour lui exprimer mes intentions et mes attentes. J’ai fais tracer une voie résidentielle. J’ai payé la caution d’un jeune, orphelin, mis en prison. J’ai visité le pays. Je m’instruis en anglais en autodidacte et j’ai pris quelques leçons de bemba pour avoir la base. J’ai appris à rouler à gauche. J’apprends la conduite tout terrain. Tout ceci, je vous le dis en vrac. C’est parce qu’il n’y a pas de chronologie. Les droits, les devoirs et les motivations sont en exercice chaque jour. Le passage à l’action, en Zambie, est sinequanone à votre survie. Faire ou ne pas faire ? La question ne se pose pas.
J’ai subi le vol, l’escroquerie, la corruption, l’abus de pouvoir, la trahison, le mépris, la maladie récurrente, la visite des bêtes venimeuses dans la maison, la disparation inexpliquée d’argent, le regard insistant et pesant des habitants, l’insalubrité et le manque d’hygiène, le manque d’eau, l’inaccessibilité à ma disponibilité financière, le dépôt de plainte contre moi à la police, la pauvreté alimentaire, l’accident de voiture mortel, l’agression physique et le harcèlement. J’ai connu l’inondation dans la case. J’ai vécu la forte pression que cause l’expiration du permis. J’ai été visité par deux jeunes venant de loin et souhaitant recevoir de ma part la formule occulte pour réussir leur vie. J’ai subi en peu de temps ce que je n’ai jamais connu en Martinique et en France de toute ma vie.
J’ai vécu l’abandon de tous mes repères, la solitude profonde, le désappointement, le renoncement, la reconsidération de mon système de valeurs, le silence du royaume divin, l’incapacité totale de m’exprimer par le verbe -me défendre, argumenter, détailler, la peur extrême, l’éclatement de ma famille, le lâché-prise. J’ai grandi en peu de temps comparativement aux nombres d’années passées en Martinique et en France.
Oui, je dis JE ! Pensez-vous que j’écrive ainsi pour m’envoyer des fleurs ou quémander de la pitié ? Dites-moi en toute objectivité, qui pourrait parler à ma place de mes expériences ? Qui saura vous rapporter avec réalisme le fonctionnement des choses en Zambie après les avoir vécues ? Et pourtant je pense que je ne dois pas être le seul témoignage pour vous. Il en faut d’autres. A bon entendeur, salut !
Depuis le calme est revenu. Il marque le temps pour reprendre des forces et se réactualiser. Il permet de faire le point sur les erreurs commises et comprendre les leçons à tirer. Il permet aussi de faire le tri des personnes de mon entourage et des idées. Il rend les décisions plus tranchantes et déterminées. Il donne des explications quant aux agissements de la Providence. Il façonne l’esprit et aiguise les émotions.
Diaspora afro caribéenne, vous voulez en savoir plus sur quoi, comment, pourquoi, combien… Vous souhaitez vous aussi vivre des expériences concrètes sur place. Discutons-en, au mieux venez sur place et faites-vous votre opinion de ce que vous pourriez réaliser dans le programme participatif.
Sarauniya Joan
