Les égalitaristes n’aiment pas ce terme: « élite ». Ils professent une égalité dans les genres, les espèces, et les races. Nous sommes tous des êtres humains disent-ils de façon inappropriée à chaque démonstration vive d’autorité, qu’ils qualifient d’injustice. Pourtant de toutes époques et de toutes civilisations, il y a eu des leaders et des followers qui les suivent. Est-ce un défaut sociétal ? Il est temps de clarifier le sujet afin d’éliminer la croyance dommageable en la supériorité et l’infériorité. Car l’Afrique a besoin de reconstruire son schéma civilisationnel. Laissez-moi vous donner mon point de vue là-dessus.
Deux profils: les leaders et les followers
Le premier profil, les leaders, sont aussi appelés les meneurs, les conducteurs, les dirigeants ou encore les guides. Le deuxième profil, les followers sont les suiveurs, les disciples, les adeptes, les fidèles et même les exécutants.
Description
LES MENEURS | LES SUIVEURS |
Investissent sur des suiveurs ayant du potentiel | Décident des leaders qu’ils veulent suivre |
Créent et organisent une réponse aux besoins des suiveurs | Produisent avec talent à partir de la matière mise à disposition. Se distinguent par la pertinence de leur mode de consommation |
Misent sur la consommation des suiveurs et la croissance de leurs besoins | Réclament les conditions optimales pour garantir leur fidélité et la bonne exécution des méthodes |
S’engagent à répondre aux conditions demandées et/ou attendues | S’engagent à fournir les résultats attendus par le meneur, dans la croissance de l’organisation |
Sont responsables de la production | Sont responsables de la productivité |
Apprennent sans cesse: créativité | S’améliorent sans cesse: perfectionnement |
Sont jugés par la valeur de leur sens des responsabilités | sont jugés par la valeur des résultats d’exécution |
Ont besoin d’argent pour accomplir leur quête | Ont besoin d’argent pour répondre à leurs besoins |
Il n’existe pas là de supériorité et d’infériorité, ni même d’égalité. Nous parlons plutôt d’interdépendance parce que l’un a besoin de l’autre pour être, donc de complémentarité. Le meneur est nommé comme tel parce qu’il y a des suiveurs qui lui font confiance. Et les suiveurs ne sont pas s’il n’y a pas de conducteurs pour prendre soin d’eux. Ainsi que chacun s’accepte donc tel qu’il est puisqu’il s’agit de nature d’être. Nul n’envie l’autre car ils ont besoin de chacun réciproquement. Et tous deux portent leur responsabilité.
Ces deux profils se retrouvent dans les deux sexes, il en va de même dans le statut social. Par exemple, un(e) enseignant(e) peut être un pédagogue, cherchant toujours de nouvelles méthodes pour mettre à l’aise ses élèves et favoriser leur compréhension, modifiant l’espace d’apprentissage, utilisant des outils très surprenants. Mais il peut aussi appliquer les méthodologies existantes, utiliser les outils courants, cela ne fait pas de lui un moins bon enseignant. A noter que ce même enseignant a dans sa classe des élèves meneurs et des élèves suiveurs. Il doit alors être assisté de son homologue complémentaire afin que chaque catégorie d’élèves bénéficie de la pédagogie qui lui convienne. Idem pour un(e) employé(e) de maison. Nettoyer une maison, laver repasser les vêtements, faire les courses, trier, ranger, recycler, embellir et parfumer, surveiller les enfants, des tâches ingrates certes, mais qui impliquent soit des qualités de meneur dans le cas où l’employeur est de nature suiveur, soit des qualités de suiveur si le maitre de maison a déjà établi toute l’organisation minutieuse de sa maisonnée.
Le meneur possède évidemment une autorité naturelle. Certains n’acceptent pas qu’un individu use d’autorité envers un autre. Mais ce n’est pas l’autorité qui est injustice, c’est ce qu’on en fait. Durant le COVID, beaucoup ont décrié les décisions des personnes qui faisaient le choix de se faire vacciner. Elles avaient confiance dans ce que rapportait une partie du corps médical. Pour elles, faire ce choix contribuaient à lutter contre la pandémie. En tant que suiveur, écouter une voix n’est pas le problème, c’est normal. Pourquoi donc les caricaturer de moutons de panurge. Le choix capital pour leur survie et celle du troupeau dans lequel elles évoluent est celui de quelle voix écouter! On n’incrimine pas quelqu’un parce qu’il suit en toute confiance un autre, on peut par contre critiquer son choix quant à l’individu ou le mouvement qu’il suit. Ce qui signifie dans le fond, qu’il suit en réalité son intuition quant à la personne ou le mouvement choisi.
Chers amis chrétiens: les brebis et leurs bergers
Il en va de même pour cette métaphore retrouvée dans plusieurs passages de la bible où il est fait mention de bons et de mauvais bergers. « Les brebis reconnaissent la voix de leur berger »: ce qui sous entend que les bons bergers ont des brebis loyales et fidèles. Elles produisent le meilleur en retour de bons soins. Alors que les mauvais bergers ne prennent pas soin de leur troupeau. Ils les épuisent, les dispersent et s’engraissent de leur viande sans leur fournir de bons pâturages. D’ailleurs, en règle générale, ils les placent dans des enclos alors que le bon berger évolue dans les vallées et les montagnes en toute liberté avec son troupeau. Ces mauvais bergers ont donc des béliers qui les attaquent, des brebis qui cassent les enclos pour préférer rester chez les voisins, des mères et petits en dispersion. Alors que les brebis satisfaites produisent efficacement du lait, de la laine, de la viande et des petits au profit de l’organisation d’élevage. Elles accourent à l’appel de leur guide. Les bons bergers se mettent en quête de leurs brebis égarées en ayant pris soin de placer en sécurité le reste de leur troupeau. Ils repèrent les animaux qui se distinguent et les sélectionnent comme tête de fil. Ils font appel non à des chiens voraces (Esaïe 56:11) mais à des agents efficaces pour assurer la sécurité du troupeau. Ils engrangent pour le saison hivernale afin qu’il ne manque de rien. Dieu rejette et châtie donc les mauvais bergers qui sont nombreux tels des loups et met l’accent sur l’élection d’un petit nombre de bons bergers portant le caractère du Christ, ne craignant pas la douleur, ni le danger, ni le ridicule, ni la défaite ; mais ayant l’unique crainte de ne pas réussir à prendre soin de ceux (les suiveurs) qui le soutiennent.
Bâtisseurs & Consommateurs
Je partage avec vous cette vidéo de Philippe SIMO très pertinente sur la position de chacun. https://www.youtube.com/watch?v=pfFJuo8EtGg Il emploie les termes consommateurs et bâtisseurs. En effet, le consommateur consomme ce qui existe, ce qui est disponible, à sa portée. Alors que le bâtisseur créé et aménage là où il n’y a rien, il invente et réunit les éléments nécessaires à la conception. Il conçoit et met en place ce dont les consommateurs auront besoin. Vous l’avez compris, ces deux profils sont indissociablement complémentaires. Nulle raison n’est valable pour affubler d’insultes l’un ou l’autre.
On leur reproche
Reproches faites aux leaders : orgueil (manque d’humilité, hautains), obstination, manque d’écoute, fourberie, hypocrisie. Si les leaders veulent que les suiveurs aient foi en leurs dires, en leur production, ils doivent en retour avoir foi en eux en les laissant se servir de leur libre arbitre (leur propre jugement de valeur) pour éprouver le produit, le système, le concept, la méthode créé.
Reproches faites aux suiveurs : obéissance c’est-à-dire exécution d’une tache/d’une règle sans questionnement et sans en rechercher l’efficacité et la véracité, peur de l’autorité sans remise en cause de son jugement, parfois collaboration pour tromper et obliger les leaders à renoncer, à pervertir ou à se soustraire.
L’élite noire, pour un nouveau schéma civilisationnel, doit reconnaitre ses points faibles et ses penchants. Ceux-ci doivent être connus de tous afin de les canaliser et les employer dans les situations appropriées, c’est-à-dire celles qui ne desservent ni l’organisation, ni ses membres.
L’élite: des leaders et des followers battants et non battus
Pour être considérer comme une élite, il faut que le leader soit au meilleur de lui-même et le follower donne le meilleur lui-même. Cette équation assurera une organisation parfaite et exponentielle. Le suiveur n’est donc pas un fataliste, se disant qu’il n’a pas le choix que d’exécuter ce qu’on attends de lui. Non! Il éprouve les règles et les méthodes, il démontre l’inefficacité d’une organisation et fait remonter ses doléances en exposant ce qu’il attend. Le meneur ne s’avouent pas vaincu lorsque la productivité escomptée n’est pas atteinte. Il va apporter des modifications et des ajustements pour fournir ce qu’on attend de lui. Il va rechercher sans relâche de nouvelles méthodes et de nouvelles matières, de meilleurs emplacements, de meilleurs outils. Contrairement à la définition du dictionnaire Le Robert du mot élite : « Ensemble des personnes les plus remarquables (d’un groupe, une communauté), pour moi, l’élite ne se compose pas uniquement de dirigeants. Les qualités sont en tous ; le potentiel de chacun est indispensable pour la bonne marche de l’organisation. C’est pourquoi, les personnes remarquables sont aussi des suiveurs qui se distinguent par leur loyauté, leur capacité d’exécution efficace, leur optimisme à toute épreuve. Nous voyons donc que les deux profils sont tout autant riches de savoir, de sagesse et d’intelligence, de moyens matériels, de chance ou encore de qualités physiques.
Leurs caractéristiques
LES SUIVEURS | LES MENEURS |
besoins physiologiques (santé, sommeil, nourriture, reproduction) pour être productif | dépasse ses limites physiologiques jusqu’à se nuire pour achever son œuvre créative |
besoin de sécurité (habitat, environnement, ressources, physique) | s’engage dans le danger, l’exposition, le manque, la perte, la séparation |
besoin d’appartenance (couple, famille, classe, organisation/groupe) | créer ou fonde son propre groupe/organisation ou modèle de groupe |
besoin d’estime de soi (confiance, valeur, indispensabilité, reconnaissance) | nul besoin de reconnaissance de sa personne mais plutôt de ses idées, de ses visions de ses actions. Se suffit à lui-même pour continuer |
besoin d’accomplissement de lui-même de manière immédiate | besoin d’impacter sur le groupe de façon pérenne |
Leurs spécificités
Les leaders veulent toujours apprendre, découvrir et expérimenter. Ils doivent évoluer dans un milieu pédagogique/andragogique libre et neutre de toute croyance. En effet tout doit être vérifiable et justifié pour eux. Un milieu en perpétuel mouvement (reconfiguration/évolution). Ils se donnent des défis personnels pour s’automotiver, d’ailleurs ils s’autoévaluent sur leurs réalisations. Ils se responsabilisent par eux-mêmes en cherchant à être toujours meilleur que la veille. Ils aiment être compris car cela signifie que leurs idées porteront des fruits à court moyen ou long terme. Tel est leur programme de progression.
Les followers veulent évoluer en toute sécurité. Ils deviennent très productifs lorsque le milieu leur est favorable. Ils se challenge au sein de leur groupe de même nature, par la beauté/stature, la rapidité d’exécution et la quantité exécutée, l’âge (ancienneté) et le caractère audacieux. Ils sont tout à fait prêts à se dépasser lorsqu’on le leur demande, dès lors que cet effort leur apporte également. Ils aiment être choyés, félicités, valorisés. Ils préfèrent la stabilité mais s’il faille faire un sacrifice pour en établir une meilleure, ils s’y engagent. Tel est leur programme de progression.
Une répartition équilibrée
Le schéma hollywoodien du sauveur et des sauvés. En réalité Hollywood n’a rien inventé. Toute comme la devise « un pour tous, tous pour un ». Les leaders ont toujours été moins nombreux que les followers, et le seront toujours. Pourquoi ? Parce que trop d’autorité, tue le peuple. Parce que deux rois ne s’assied pas sur un même trône. La hiérarchie de l’autorité en Afrique ancestrale place la reine comme la conceptrice et l’organisatrice du royaume, et le roi protecteur-défenseur du dit royaume organisé. Alors oui il y a un « sauveur » (mâle/femelle unis) et des « sauvés ». Ceci ne veut pas dire que le projet civilisationnel africain repose sur une seule personne, cela signifie qu’il doit être le produit d’une pensée collective de plusieurs bâtisseurs (femmes et hommes unis) chacun dans son domaine de recherches. Et ce en gardant à l’esprit qu’ils ne sont pas nombreux.
Appel à l’élite noire
Ce qu’il faut donc maintenant, c’est que les bâtisseurs africains de la diaspora et du continent s’unissent quelque soit le lieu où ils se trouvent, sur une même plateforme où ils y déposeront leurs concepts, leurs prototypes, leurs théories, leurs idées, leurs modèles, les conclusions de leurs recherches, leurs organisations, leurs formules, leurs œuvres et leurs écrits, pour une étude globale du projet de renaissance africaine. Ainsi les consommateurs en grand nombre pourront consulter les travaux, remettre en cause les idées, questionner les créateurs et comparer les recherches, afin d’en tirer un choix collectif et unanime.
Quelque soit votre domaine: éducation, formation, finance, environnement, philosophie/tradition, culture (langue, religion, coutumes, sport, mode, économie), santé de l’être entier (corps et âme), technologie, art, agriculture (plantation, élevage), commerce, diplomatie, sécurité, préservation/conservation, transport, construction… etc, meneurs ou suiveurs, vous êtes INDISPENSABLES à l’Afrique nouvelle.
Sarauniya Joan